Souveraineté alimentaire : lancement du plan de souveraineté pour la filière fruits et légumes

Publié le 02/11/2022

Dans le cadre du plan de résilience agricole et agroalimentaire, destiné à faire face aux conséquences de la guerre en Ukraine, le Ministère a interrogé chaque secteur des fruits et légumes sur la problématique de la souveraineté alimentaire. UNILET a remis au Ministre sa contribution co-construite avec l’ensemble de la filière en juillet. Elle inclut un diagnostic, ses ambitions stratégiques et les mesures concrètes à court et moyen terme qui en découlent.

Les évènements géopolitiques, sanitaires, économiques et climatiques récents rebattent les cartes et font reconsidérer avec plus de gravité les dépendances grandissantes de notre agriculture. Le plan de résilience gouvernemental doit permettre de faire face aux conséquences de la guerre en Ukraine, mais aussi au-delà, de bâtir une stratégie opérationnelle de sortie des dépendances dans des secteurs clés, permettant de renforcer notre souveraineté nationale et européenne. Le secteur des fruits et légumes, frais et transformés, y a donc toute sa place.

Inverser la tendance de toute urgence

La crise Covid avait déjà mis en lumière la fragilité particulière de nos filières fruits et légumes dans le paysage agricole français. La guerre en Ukraine a encore fragilisé la situation compte tenu de la hausse brutale des coûts de l’énergie et de nombreuses matières premières.

Cependant, la perte d’autonomie nationale est bien plus ancienne que ces évènements. Pour le secteur des fruits et légumes frais, la baisse du taux d’auto-approvisionnement, actuellement de 63 % (hors agrumes et fruits exotiques), tend à s’accélérer sur les deux dernières décennies : respectivement – 11 % pour les fruits (hors agrumes et fruits exotiques) et – 19 % pour les légumes.

La situation est encore plus inquiétante pour les fruits et légumes transformés, dont les importations sont plus deux fois plus importantes que les exportations (en valeur). Là aussi, le déficit de compétitivité, à l’amont et/ou à l’aval (selon les situations), s’aggrave depuis les années 2000. Pour les légumes transformés, le taux d’auto-approvisionnement s’établit à 57 % pour les légumes en conserve, et à seulement 26 % pour les légumes surgelés (voir l’encadré). Face à ce constat, la filière a proposé de se fixer comme premier objectif, à horizon 2030, de stopper cette érosion continue et de retrouver les niveaux de souveraineté des années 2010. Cela reviendrait à reconquérir 12 points sur notre balance commerciale : un objectif ambitieux, mais réaliste, si la volonté politique est au rendez-vous.

Extrait de la contribution UNILET – Partie « Diagnostic ».

À l’heure où les bienfaits de la consommation de légumes ne sont plus à démontrer, nos filières font paradoxalement face à une déconsommation qui doit interpeler les pouvoirs publics. Simplification des repas (moins d’entrées, moins de préparation), choix entre féculent ou légumes… pénalisent la consommation de nos légumes, alors que parallèlement, leurs vertus ne cessent d’être réaffirmées : des produits sains, de saison, accessibles à tous, pratiques à cuisiner, faciles à stocker, qui limitent le gaspillage alimentaire et participent à la décarbonation de notre assiette. La consommation de légumes, frais et transformés, est aujourd’hui une question de santé publique majeure qui doit aussi être prise en compte.

La souveraineté n’est pas l’autarcie

Pour répondre à ses ambitions en matière de souveraineté alimentaire, la France dispose de réels atouts. Sa large gamme de fruits et légumes, issue d’une grande diversité de territoires et de zones climatiques, dans l’hexagone mais également dans les territoires ultra-marins, lui permet d’être plus autonome et de sécuriser sa production. Pour autant, la souveraineté ne doit pas être une stratégie de l’autarcie ou du repli sur soi. Certains territoires européens présentent des atouts naturels ou socio-économiques qui renforcent leurs capacités à se positionner en acteurs majeurs pour une production européenne d’envergure. La répartition des productions sur plusieurs bassins géographiques distincts est également un facteur de résilience, dans un contexte climatique de plus en plus instable. Pour notre filière, c’est l’équilibre des échanges alimentaires entre les différentes zones de l’Europe qui doit être le projet politique. La France a toute sa place pour participer grandement à la production européenne, et pour certaines de ces productions, elle a aussi la capacité de dépasser largement les besoins de sa consommation locale. En clair, il ne nous semble pas anormal que l’Espagne ou l’Italie contribuent au-delà de leurs besoins nationaux aux productions légumières méditerranéennes, et que la France soit de la même façon un grand pays pour le pois, le haricot, l’épinard, la carotte ou les choux fleurs. Il est capital de préserver et développer les atouts et savoir-faire productifs français, pour permettre au pays de contribuer à la souveraineté alimentaire européenne.

Une ambition saluée, dans l’attente de résultats concrets

Le plan « fruits et légumes » vise à donner un « cadre stratégique » et des « leviers d’actions opérationnels » afin que les filières puissent inverser la tendance des courbes de production à horizon 2030 et répondre aux enjeux agro-environnementaux de demain « par des méthodes de production durable ».

Après avoir étudié les contributions remontées des différentes filières du secteur des fruits et légumes, le Ministère a défini les 4 grands axes de ce futur plan :

Pour UNILET, ce découpage semble tout à fait pertinent. Les attentes portent désormais sur le niveau d’ambition et de travail que le Gouvernement et les Ministères placeront sur chacun de ces axes.

Le 27 septembre, la réunion de lancement a été présidée par le Ministre de l’agriculture Marc Fesneau. Éric Legras, membre du Bureau et du Conseil d’Administration d’UNILET, a représenté la filière et rappelé à ce titre nos positions clés sur chacun des futurs axes de travail. Des groupes de travail spécifiques se conduiront d’octobre à décembre, ils seront pilotés par les services du Ministère auxquels sont associés les différentes filières des fruits et légumes. L’objectif est d’annoncer le lancement de ce futur plan en février 2023, lors du Salon de l’Agriculture.

Réunion de lancement du Plan de Souveraineté Fruits et Légumes le 27 septembre 2022 au Ministère de l’agriculture. Éric Legras, administrateur et Président UNILET de 2015 à 2020, représentait l’interprofession.


La filière reste néanmoins vigilante quant aux « effets d’annonce ». Si le diagnostic et l’ambition politique semblent correctement adressés, le Ministère est encore très évasif sur les moyens dont il disposera pour la mise en œuvre de ce plan d’action stratégique. Nous espérons qu’il ne s’agira pas que d’un recyclage, ou habillage, de dispositifs existants. La disparition accélérée de solutions phytosanitaires, l’intensification des effets du changement climatiques, les enjeux liés à l’énergie et l’envolée des cours des matières premières justifient à eux seuls de décupler les moyens de recherche – publique, collective et privée – à destination de nos filières. L’implémentation de ces nouvelles solutions dans nos modes de production demandera elle aussi des soutiens aux investissements. Au-delà de cette question des priorités à fixer pour les fonds financiers, la filière escompte de pouvoir engager une discussion de fond pour l’évolution de certains processus réglementaires français. Affaire à suivre !

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